Plus de 2 parents sur 3 aux États-Unis affirment que leurs garçons ne se sentent pas à l'aise de partager leurs sentiments de peur ou de solitude.
En 2020, Kering Foundation et Equimundo ont publié un rapport issu d'une enquête nationale menée auprès de parents de garçons âgés de 4 à 14 ans aux États-Unis, sur la base d'une étude réalisée par PerryUndem.
Alors que 56 % des parents (de garçons âgés de 4 à 14 ans) déclarent qu'il est "très important" pour eux que leurs fils aient une force émotionnelle, ils indiquent également que leurs garçons ne sont pas à l'aise pour partager toute la gamme de leurs sentiments.
Le rapport, intitulé "Staying-at-Home with our Sons: Fostering Healthy Masculinity in Challenging Times", révèle qu'environ 2/3 des parents reconnaissent que les garçons se sentent à l'aise pour exprimer leur colère, mais qu'ils ne sont pas enclins à dévoiler leur peur, leur tristesse, leur solitude ou leur manque de confiance en eux. Près de la moitié des parents affirment que leurs enfants ne se sentent pas à l'aise pour parler d'amour.
Le rapport souligne l'influence des pressions sociales exercées sur les garçons pour qu'ils se conforment aux normes sociales, et formule des recommandations sur la manière de les aider à s'affranchir des stéréotypes masculins. Il vise à aider les garçons à se sentir plus à l'aise pour exprimer leurs émotions de manière positive, à être eux-mêmes (sans se sentir obligés d'"agir comme des garçons") et à établir et entretenir des relations avec les autres, ce qui contribuera à terme à atteindre l'égalité entre les hommes et les femmes et à prévenir les violences. Ces données proviennent d'une enquête nationale représentative menée auprès de parents de garçons âgés de 4 à 14 ans aux États-Unis, complétée par des entretiens approfondis avec 16 garçons âgés de 8 à 16 ans en Californie et en Pennsylvanie, menés par PerryUndem.
La majorité des parents (de garçons âgés de 4 à 14 ans) aux États-Unis - environ 60 % - reconnaissent les pressions sociales que subissent les garçons pour être forts physiquement, s'intéresser au sport et "s'intégrer". En outre, 41 % des parents déclarent que les garçons subissent des incitations à avoir une petite amie ou à aimer les filles sur le plan romantique (en d'autres termes, à être hétérosexuels) ; et 45 % déclarent que les garçons subissent des pressions pour ne pas pleurer.
"Si vous montrez vos sentiments, vous avez l'air faible et vulnérable. Les gens remarqueront cette fragilité et l'utiliseront contre vous".
— Garçon de 15 ans interrogé
Ces pressions semblent s'intensifier au fur et à mesure que les garçons grandissent : dans les entretiens, les garçons eux-mêmes déclarent qu'au début de l'adolescence, vers 10-12 ans, ils se sentent davantage forcés de correspondre aux stéréotypes masculins qu'auparavant. Cette trajectoire peut continuer à s'accentuer avec l'âge : dans toutes les catégories, les parents interrogés dont les fils sont plus âgés (12-14 ans) déclarent que leurs garçons subissent plus de pressions pour correspondre à un idéal masculin que les parents de garçons âgés de 4 à 11 ans. Certains parents peuvent consciemment ou inconsciemment renforcer ces stéréotypes masculins : 25 % des parents interrogés reconnaissent qu'il est très important que leur fils "agisse comme un garçon" (et non comme une fille), 19 % pensent qu'il est très important que leur fils soit hétérosexuel.
Cela n'est pas surprenant, si l'on considère les recherches d'Equimundo, qui révèlent qu'au moins 72 % des jeunes hommes (18-30 ans) aux États-Unis indiquent qu'on leur a affirmé qu'"un 'vrai' homme se comporte d'une certaine manière" à un moment ou à un autre de leur vie, et que cette manière implique souvent d'être hétérosexuel, fort, et de prendre des risques. Cela peut avoir des conséquences négatives : les jeunes hommes qui ont une vision plus stéréotypée de la virilité sont plus malheureux, dépressifs et anxieux, plus susceptibles d'avoir considéré le suicide, de boire de façon excessive, de harceler, d'intimider, et d'être violent que les jeunes hommes qui ont une vision moins restrictive de la masculinité.
Cependant, les préférences pour l'honnêteté, le respect et la santé mentale de leurs fils démontrent que, malgré la persistance de conceptions négatives concernant la masculinité, de nombreux parents s'efforcent d'aider leurs fils à s'affranchir des stéréotypes : 61 % des parents ont choisi "l'honnêteté" dans leur liste des cinq qualités qu'ils jugent les plus importantes à inculquer à leurs fils, tandis que 56 % ont opté pour "le respect des autres" et 53 % pour "le sens des responsabilités". Seuls 7 % des parents sont d'accord pour dire qu'être physiquement fort devrait constituer la première priorité de leur fils. Comme de nombreux parents passent plus de temps avec leurs enfants en raison de la propagation du COVID-19, il y a là un défi et une occasion de continuer à aider les garçons à s'affranchir des stéréotypes et à partager leurs sentiments de manière constructive et en toute sécurité.
"La propagation du COVID-19 signifie que beaucoup d'entre nous passent non seulement plus de temps à la maison avec nos enfants, mais nous nous inquiétons également de l'impact de la crise sur leur bien-être et le nôtre", déclare Gary Barker, Président-directeur général d'Equimundo. "Pendant cette période, en tant qu'adultes, nous avons la possibilité de montrer comment exprimer nos craintes et nos inquiétudes, et comment donner et recevoir du réconfort ainsi que du soutien. Nous espérons que ces conseils aideront les parents à encourager leurs enfants, en particulier leurs fils, à exprimer et à gérer des sentiments difficiles pendant cette période compliquée et encore longtemps après".
Le rapport recommande des initiatives que les parents peuvent prendre, notamment : Parler ouvertement aux enfants de leurs propres peurs, incertitudes et déceptions, d'une manière adaptée à leur âge ; Profiter du temps à la maison pour parler de manière constructive avec leurs garçons ; Reconnaître les défis particuliers que les garçons ressentent à l'idée d'être vulnérables, et le courage qu'il leur faut pour être ouverts ; Renforcer le fait qu'il est normal d'avoir besoin d'aide et de la demander ; Chercher de l'aide pour soi-même afin de prendre soin de sa santé mentale et physique ; Se rappeler que vous n'êtes pas seul.
"Perpétués de génération en génération, les stéréotypes sexistes sur ce qu'est un "vrai homme" - qui ne tolèrent pas l'expression d'émotions - ont un impact direct sur les violences faites aux femmes dans le monde entier. Pour paraphraser Simone de Beauvoir, "on ne naît pas homme, on le devient". Le rôle des parents, mais aussi l'école, le sport et la télévision sont essentiels pour construire une nouvelle conception de la masculinité, basée sur l'égalité de genre", déclare Céline Bonnaire, Déléguée générale de Kering Foundation.
Ce rapport est le premier d'une série de nouvelles recherches et ressources de la Global Boyhood Initiative, un projet d'Equimundo et de Kering Foundation.